Eniarduf.Thatsall

Il n'est encore que le guitariste timide aux cheveux longs.

Vendredi 1er janvier 2010 à 20:47

Il doit être 17 heures. Le soleil déclinant finit sa course dans un azur voilé.Le jeune garçon s'avance, doucement, en rêvant. Il est attentif à tout ce qui l'entoure. Attentif à tout, sauf aux autres, à tous ceux-là qui voient mais ne regardent pas, qui entendent mais n'écoutent pas. Ce sont ceux-là, enfermés dans leurs normes, entres leurs bornes, avec leurs esprits restreints, qui ont autrefois formé le monde à leur convenance, avec leurs structures hiérarchisées qui perdirent vite, très vite, les valeurs inculquées au commencement. Et c'est cette société qui forme les nouveaux venus, les nouveaux arrivants, à son image. C'est cette société qui, profondément conservatrice, ne se donne la peine d'agir que lorsqu'elle est menacée ou qu'elle peut en tirer un quelconque bénéfice à court terme. Mais c'est justement à tout cela que le jeune garçon ne prête pas attention. Lui, il observe tout ce qui attire son attention. Lui, il chantonne ces airs qui lui trottent dans la tête depuis le matin, il se sépare un peu, en cet instant de répit, des vagues préoccupations de son âge. Il bifurque, prend des détours, va là où ses pieds le mènent sans leur poser de question, sans se poser de question. Il s'arrête. Il s'arrête et son regard s'attarde sur ce vieillard, aigri par les années, détesté dans le quartier, qui ramasse avec sa pelle et son balai les papiers, plastiques, mégots, chewing-gums, et autres canettes que les gens de la bienfaisante société ont laissé sur le pas de sa porte, devant sa cour, sa maison, sa vie. Toujours doucement, le jeune s'approche. Au bruit de ses pas, le vieillard, qui observait un couple d'oiseaux sur un arbre voisin sursaute et laisse, avec un juron, bruyamment tomber le balai sur le sol. Le manche, sec, est cassé. Le vieil homme laisse monter sa froide colère empreinte de lassitude, froide comme l'air alentour qui leur mordait les joues, et lance un regard noir au petit qui le fixe. S'appuyant sur sa pelle, il ramasse le balai et poursuit tant bien que mal sa besogne. Le jeune ne bouge pas. Le vieux se redresse, le toise, et lance : 
<< Qu'as-tu à me regarder ainsi ? N'as-tu rien demieux à faire que d'importuner un vieil ours ? Rentre chez toi, va faire tes devoirs ou aider tes parents, petit voyou ! C'est encore ce que tu as de mieux à faire dans ce monde de fou ! Les autres ne m'aiment pas et je n'aime personne. Tous ceux que j'aimais ou que j'ai aimé sont partis. Va-t-en ! 
- Eh bien, moi, je sens que je vous aime déjà, rétorqua le garçon. Et je me fiche bien de ce que pensent les autres. >>
A son tour, il regarda les oiseaux dans l'arbre puis posa un regard profond, grave, et plein d'un amour naÏf que les enfants donnent sans compter avant que leurs rêves ne soient brisés. 
<< Grand-père, raconte-moi une histoire, ton histoire, demanda-t-il. >>
En entendant cela, l'homme se souvint et s'effondra. Ce vieux roc que la vie avait durci, qui avait tenu bon face à toutes les tempêtes se brisa. Ses défenses abaissées, il s'écroula. Il pleurait désormais. Il pleurait tout en ayant le sourire. Lorsqu'il se releva, il était serein, plus serein qu'il ne l'avait été depuis bien longtemps.Il sourit au gamin. C'est ainsi que commença leur histoire. A nous d'écrire la nôtre.

Aimer les gens, aimer la vie, mais par dessus tout, aimer aimer. 
" Old man, look at my life, I'm a lot like you were. "


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Par Gil le Samedi 2 janvier 2010 à 11:29
J'aime beaucoup, l'histoire est très belle, cette écriture t'est singulière =[). Après on peut se poser de nombreuses questions, comment est venu cette idée de l'écrire, d'où ça vient. Bon comme j'ai vu le manuscrit de départ et comme la musique était écrite en premier, celle-ci a pu t'inspirer. Il y a la possibilité d'un récit par rapport à du vécu ect ... Toute sorte d'idée que l'on peut se poser, ce genre de question qui prouve que le texte incite au lecteur toute son attention. La phrase de fin est prenante comme pour la petite musique qui illustre très bien ton texte ...
J'aime beaucoup.
Par Un-sourire-suffit le Samedi 2 janvier 2010 à 22:18
Je ne sais pas trop quoi dire. Ce texte me donne simplement l'envie d'avoir une vie mouvementée, pleine de moments extraordinaires. Ce texte est beau. Et puis, ce vieillard est si profond. J'aurai presque envie d'être comme lui plus tard. Pas envie de savoir comment cela t'es venu à l'esprit. Juste envie de te remercier de l'avoir écrit. ;)
Par enfant-du-siecle le Mercredi 6 janvier 2010 à 20:50
Pas de coïncidence. C'était tout à fait voulu. J'avais pensé aux détails. Appeller une personne par son détail plutôt que par ce qu'il est. Le manteau rouge était ce qui caractérisait la personne dont tu m'as parlé. Les autres détails sont ce qui caractérisent d'autres personnes. Il m'est venu naturellement, le manteau. En plus il me fait penser à un film, qui n'a rien à voir, mais qui reprend la symbolique du manteau rouge, seul éclat dans un monde sans couleur.
 

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